Arrestation de fugitifs dans le cadre de l’opération mondiale antimafia I-CAN

23 juillet 2020
Les fugitifs sont liés à la vaste et puissante organisation criminelle de la ‘Ndrangheta

LYON (France) – La coordination dans le cadre du projet INTERPOL de lutte contre la ‘Ndrangheta (I-CAN) – une initiative conjointe d’INTERPOL et de l’Italie – a permis aux services chargés de l’application de la loi d’appréhender six malfaiteurs en fuite, en Albanie, en Argentine et au Costa Rica, à la suite de renseignements recueillis lors d’une précédente opération contre la ‘Ndrangheta en novembre 2019.

L’opération « Magma 2007 » menée l’année dernière visait des individus recherchés pour association avec la ‘Ndrangheta, ainsi que pour trafic et détention d’armes illégales. Conduite par la Guardia di Finanza et la Direzione Centrale Servizi Antidroga italiennes, et coordonnée par la Direzione Distrettuale Antimafia à Reggio de Calabre, l’opération avait abouti à l’arrestation de 45 suspects dans toute l’Italie.

La recherche des fugitifs de la ‘Ndrangheta liés à ceux arrêtés lors de l’opération Magma 2007 était pilotée par la Direction centrale de la police criminelle italienne qui a utilisé le canal INTERPOL, renforcé aux fins du projet I CAN, permettant ainsi un échange rapide de renseignements entre les unités antimafia spécialisées de la police italienne et les services chargés de l’application de la loi des pays concernés.

Saisie de 400 kg de cocaïne et démantèlement d’un clan de la ‘Ndrangheta

Le 21 juillet, trois des fugitifs ont été arrêtés à Buenos Aires alors qu’une opération menée simultanément à Tirana (Albanie) aboutissait à la capture d’un quatrième individu lié à la ‘Ndrangheta.

Le lendemain, un cinquième fugitif était arrêté au Costa Rica.

Un sixième, qui s’était soustrait à l’arrestation lors de l’opération Magma 2007, avait été appréhendé en Albanie en mai dernier.

L’ensemble des opérations a permis de mettre la main sur 400 kg de cocaïne, 30 kg de hachich, 15 kg de marihuana, un fusil d’assaut automatique, trois pistolets semi-automatiques, un silencieux et des munitions de calibres divers.

Grâce aux opérations et aux enquêtes qui s’en sont suivies, la police a pu démanteler complètement le clan Bellocco, une famille de la ‘Ndrangheta, à Rosarno (Reggio de Calabre) et ses ramifications régionales, en arrêtant tous les gros bonnets de la famille qui opérait dans toute l’Italie.

Doté de moyens financiers considérables, le clan Bellocco était impliqué dans l’importation par bateau en Italie de cocaïne sud-américaine, en particulier d’Argentine et du Costa Rica. À cette fin, le groupe dépendait d’émissaires qui faisaient fréquemment la navette entre la base calabraise du clan et les pays fournisseurs.

Ces individus étaient dans le collimateur du fait de la détermination du procureur en chef de Reggio de Calabre à traduire en justice les suspects de la 'Ndrangheta qui tentent de s’y soustraire en s’enfuyant à l’étranger.

Des fonctionnaires de la Police fédérale argentine et du B.C.N. INTERPOL Buenos Aires opèrent une arrestation.
Des fonctionnaires de la Police fédérale argentine et du B.C.N. INTERPOL Buenos Aires opèrent une arrestation.
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Une pollution silencieuse de l’économie mondiale

« Cette opération met en évidence la nécessité d’une approche globale des activités criminelles à grande échelle de la ‘Ndrangheta et illustre l’ampleur de la coopération policière internationale, des moyens et du soutien d’INTERPOL qui peut être obtenue grâce au projet I-CAN », a déclaré le Préfet Rizzi, Directeur général adjoint de la Sécurité publique à la Direction centrale de la police criminelle italienne.

« La 'Ndrangheta représente une menace qui a silencieusement pollué l’économie de plus de 30 pays à travers le monde. Le seul moyen de la contrer est de le faire avec un réseau mondial plus efficace », a-t-il ajouté.


« Cette opération, qui a lieu seulement quelques mois après le lancement d’I-CAN, n’est que le début de la riposte mondiale des services chargés de l’application de la loi pour venir à bout de l’une des organisations criminelles les plus vastes et les plus puissantes au monde », a indiqué le Secrétaire Général d’INTERPOL Jürgen Stock.

« Alors que la ‘Ndrangheta représente une menace presque invisible, ces arrestations coordonnées opérées à plus de 10 000 km de distance contribuent à mettre au jour ses activités illicites, démontrant ainsi l’importance cruciale de la coopération policière internationale », a ajouté le chef d’INTERPOL.

« Mon bureau est fermement résolu à combattre les organisations de la ‘Ndrangheta, y compris par-delà les frontières nationales, en collaboration avec toutes les autorités judiciaires et policières, comme ce fut le cas lors de cette opération », a déclaré le procureur en chef de Reggio de Calabre, Giovanni Bombardieri.

« Je tiens à remercier INTERPOL pour le précieux concours qu’il a apporté dans le cadre du projet I-CAN à nos enquêteurs nationaux. »

Arrestations à Buenos Aires

En coordination avec la Procuraduría de Narcocriminalidad argentine, le Bureau central national (B.C.N.) d’INTERPOL à Buenos Aires et la Police fédérale et la Gendarmerie nationale argentines ont prêté leur concours aux arrestations suivantes à Buenos Aires :

  • Ferdinando Sarago, un passeur et un proche de confiance de la 'Ndrangheta, qui voyageait entre l’Amérique du Sud et la Calabre. La ‘Ndrangheta faisait appel à lui pour divers besoins opérationnels et pour le transport de documents secrets. Il avait rencontré Carmelo Aglioti (l’un des 45 suspects arrêtés en novembre) en Argentine lors d’un voyage ayant pour but de résoudre l’échec d’une importation de drogue pour le compte des familles Pesce et Bellocco, appartenant toutes les deux à la ‘Ndrangheta.
  • Giovanni Di Pietro, alias Massimo Pertini, domicilié à Buenos Aires, était l’un des principaux intermédiaires dans les transactions entre les gangs de la ‘Ndrangheta italienne et les pourvoyeurs de drogue sud-américains. En 1978, il avait été impliqué dans l’enlèvement de Franz Trovato, le fils d’un industriel local à Acireale (Italie), qui s’était soldé par la mort du jeune homme lors de sa tentative d’évasion après 21 jours de captivité.
  • Fabio Pompetti, de nationalité argentine, qui, grâce à son réseau local de relations, était en mesure de contourner les systèmes antiblanchiment et de se soustraire aux contrôles douaniers. Pendant des années, il a travaillé comme représentant des pourvoyeurs de drogue sud-américains auprès de la 'Ndrangheta.

Arrestation en Albanie

En Albanie, la police d’État, avec l’appui du B.C.N. INTERPOL à Tirana, a coordonné l’arrestation de Bujar Sejdinaj, dit « L’Oncle ». Appartenant aux avant-postes de la Ndrangheta – et en particulier de la famille Bellocco – dans les Balkans, Sejdinaj a participé à l’achat d’une vingtaine de kilos de cocaïne en Espagne.

Le cinquième fugitif de l’opération Magma 2007, Adrian Cekini, avait été interpellé à Elbasan (Albanie) le 26 mai.

Arrestation au Costa Rica

Des membres du B.C.N. INTERPOL à San José ont arrêté Franco D'Agapiti le 22 juillet à Jacó. Né à Rome, D’Agapiti était copropriétaire de l’hôtel casino Amapola à San José, soupçonné d’être installé dans le pays pour y être le représentant du clan Bellocco. Son rôle présumé était de faciliter l’entrée de la cocaïne en Italie, utilisant son réseau et son hôtel à l’étranger pour fournir un soutien logistique aux visiteurs du clan ('Ndranghetisti).

Les 11 pays pilotes du projet I-CAN sont : l’Allemagne, l’Argentine, l’Australie, le Brésil, le Canada, la Colombie, les États-Unis, la France, l’Italie, la Suisse et l’Uruguay.