SAN SALVADOR (El Salvador) – Une opération menée par INTERPOL contre le trafic de migrants dans la région Amériques a abouti à l’arrestation de 53 personnes et à l’identification de quelque 775 migrants originaires de 30 pays.
Au cours de l’opération Turquesa (28 - 31 octobre), les autorités de 20 pays de trois continents ont exploité des pistes et effectué près d’un million de vérifications à des points de passage frontaliers aériens, terrestres et maritimes afin de démanteler les réseaux criminels organisés contrôlant les principaux itinéraires de trafic vers les États-Unis et le Canada.

Bon nombre des pistes d’enquête avaient été obtenues dans le cadre de l’opération Andes (2018), qui avait permis de mettre au jour un important flux migratoire en provenance d’Asie du Sud-Est, raison pour laquelle le Bangladesh a été invité à participer à l’opération Turquesa. L’opération policière simultanée menée pendant cinq jours a été conduite par le Réseau opérationnel INTERPOL de spécialistes de la lutte contre le trafic de migrants (ISON), composé de 165 experts de 126 pays d’origine, de transit et de destination.
Le Bureau régional d’INTERPOL de San Salvador a accueilli l’Unité de coordination opérationnelle (UCO), qui a bénéficié 24 heures sur 24 de l’appui du Centre de commandement et de coordination de l’Organisation ainsi que de celui de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).
Démantèlement par le Brésil d’une importante filière de trafic
L’un des principaux résultats de l’opération Turquesa a été l’arrestation d’un homme de 32 ans originaire du Bangladesh, soupçonné d’être l’instigateur de l’un des plus vastes trafics de migrants vers les États-Unis. Les autorités brésiliennes ont totalement démantelé son réseau, qui aurait facilité le passage illégal de plus de 200 personnes en provenance d’Asie du Sud.

Les autorités, qui ont bloqué 42 comptes bancaires, estiment que le groupe a effectué des transactions pour un montant total d’environ 10 millions d’USD, ce qui donne une idée de l’ampleur des « affaires » réalisées par ces organisations criminelles.
Les victimes

La première des priorités des malfaiteurs étant de gagner de l’argent, les victimes entendues lors de l’opération Turquesa ont évoqué le peu de considération pour leur bien-être dont faisaient preuve les personnes qui les avaient en charge.
Des migrants au Mexique ont raconté avoir été menacés de viol et de meurtre s’ils ne payaient pas les trafiquants dans un délai de quelques heures.
En Espagne, un ressortissant bangladais a expliqué que son voyage lui avait coûté 6 000 EUR et qu’il avait mis un an pour arriver à Malaga. Il avait été maintenu en captivité en Algérie et menacé pendant plusieurs mois, alors que les trafiquants extorquaient de l’argent à son père. Après l’avoir libéré, ceux-ci lui avaient confisqué son passeport et lui avaient fait prendre un bateau bondé pour traverser la Méditerranée. Il avait perdu connaissance pendant le trajet.
« Le trafic de migrants est un problème permanent, car les groupes criminels continuent de s’en prendre aux migrants pour engranger des profits illicites considérables », a déclaré le Secrétaire Général d’INTERPOL, Jürgen Stock.
« Nous avons pour mission de relier les polices entre les différents continents et le long des routes connues de trafic afin que les migrants ne soient pas les victimes de fausses promesses de voyages bien organisés vers une vie meilleure. Il faut le savoir : ces voyages sont généralement dangereux – voire mortels – que ce soit à travers la jungle, par bateau ou, comme on l’a vu récemment, en camion », a conclu le chef d’INTERPOL.
Événements opérationnels marquants
Les capacités policières d’INTERPOL ont joué un rôle essentiel lors de cette opération, qui a donné lieu à plus de 300 000 vérifications dans les différentes bases de données de l’Organisation, lesquelles ont signalé 17 concordances.
Grâce au renforcement des contrôles aux frontières, sept personnes ont été arrêtées pour diverses infractions, dont le trafic de drogue et la détention d’armes à feu. À El Salvador, une personne faisant l’objet d’une notice rouge a été arrêtée pour le meurtre d’un adolescent en République dominicaine.
L’opération a également eu les résultats suivants :
- Une personne faisant l’objet d’une notice rouge INTERPOL publiée par l’Équateur a été arrêtée en République dominicaine. L’homme était le chef connu d’un groupe criminel se livrant au trafic de migrants vers les États-Unis ;
- Vingt-sept victimes de trafic d’êtres humains ont été secourues en République dominicaine, ce qui a conduit à l’arrestation de 11 personnes ;
- Le Mexique a arrêté quatre personnes suite à des concordances signalées dans les bases de données d’INTERPOL et dans les bases de données nationales obtenus au cours de contrôles frontaliers renforcés ;
- Les autorités du Nicaragua ont arrêté deux personnes pour avoir fait passer clandestinement la frontière à 22 migrants, dont trois jeunes enfants ;
- L’Argentine a arrêté une femme de 24 ans originaire du Venezuela suite à une concordance avec une notice rouge INTERPOL relative à un trafic d’êtres humains ;
- Lors du démantèlement d’un groupe criminel, les autorités colombiennes ont établi un lien entre 732 mandats, d’un montant de 110 000 USD, et 17 pays.
D’autres résultats sont attendus dans les mois à venir, à mesure que les enquêtes se poursuivront et que les policiers remonteront les filières de trafic.
Une action commune
Le projet Aircop, un projet pluri-institutionnel fondé sur la coopération entre l’ONUDC, INTERPOL et l’Organisation mondiale des douanes, a dispensé une formation préopérationnelle à la Police nationale de la République dominicaine et assuré la liaison avec l’UCO à San Salvador concernant les données relatives aux contrôles des passagers.
L’ONUDC apportera son concours au réseau ISON dans le cadre des enquêtes en cours par l’intermédiaire du réseau REDTRAM – spécialisé dans la traite de personnes et le trafic de migrants – de l’Association ibéro-américaine des ministères publics (AIAMP). L’Organisation apportera également l’expertise liée à son mandat en matière de lutte contre le trafic de migrants, en participant à l’élaboration d’un rapport d’analyse final.

Pays participants :
Argentine, Bangladesh, Bolivie, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Espagne, Équateur, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine et Uruguay.
L’opération Turquesa a reçu le soutien financier de la Fondation INTERPOL pour un monde plus sûr.