ISTANBUL (Turquie) – L’Assemblée générale d’INTERPOL a adopté une résolution visant à remédier aux difficultés auxquelles se heurtent les professionnels de l’application de la loi qui enquêtent sur des affaires d’abus et d’exploitation pédosexuels en ligne.
À travers cette résolution, les pays membres ont exprimé leur préoccupation face à l’utilisation accrue du chiffrement de bout en bout pour dissimuler des actes de pédocriminalité en ligne tels que le pédopiégeage, la diffusion en direct d’abus sexuels et la diffusion de contenus à caractère pédosexuel.
Le chiffrement de bout en bout est un dispositif de protection de la vie privée grâce auquel les images, les vidéos, les textes écrits et les communications en direct ne sont visibles que par l’expéditeur et le destinataire. Son utilisation empêche les fournisseurs de services de détecter les abus pédosexuels et d’obtempérer aux demandes adressées par les autorités chargées de l’application de la loi en vue d’enquêter sur des affaires, d’arrêter des auteurs d’infractions et de soustraire des enfants au danger.
Dans cette optique, la résolution GA-2021-89-RES-09 appelle les pays membres à inciter les fournisseurs de services qui proposent le chiffrement de bout en bout à prendre leurs responsabilités en concevant des produits et des services intrinsèquement sûrs pour les enfants, et à répondre aux demandes des autorités chargées de l’application de la loi qui veulent obtenir les informations pertinentes.
Elle demande également la mise en place d’une législation et de politiques générales qui permettent aux services chargés de l’application de la loi de prévenir et de combattre les abus pédosexuels en ligne sur ces plateformes.
La République de Corée et l’unité d’INTERPOL chargée de lutter contre la pédocriminalité sont à l’initiative de la résolution, qui a été approuvée à une très large majorité des délégués et élaborée par un groupe de travail multinational sous l’égide du Groupe spécialisé d’INTERPOL sur la criminalité contre l’enfance.
Yong Hwan Lim, le Directeur général des Affaires étrangères de la Police nationale coréenne, a déclaré : « L’année dernière, la Police nationale coréenne a mené une enquête de grande ampleur sur un réseau de sextorsion opérant à partir d’une plateforme qui offrait le chiffrement de bout en bout. Cette résolution qui vient d’être adoptée n’est qu’un moyen de montrer que la lutte que nous menons contre l’exploitation pédosexuelle en ligne ne s’arrête pas quand une affaire est résolue. L’expérience acquise grâce à cette enquête nous a conduits à faire appel à la communauté policière internationale – via INTERPOL – afin de rendre l’espace numérique plus sûr pour les enfants. »
À la suite de l’adoption de la résolution, le Secrétaire Général d’INTERPOL Jürgen Stock a déclaré : « Cette problématique est souvent présentée comme un ‘jeu à somme nulle’, où il s’agit de choisir entre protection de la vie privée et protection de l’enfance, or les deux peuvent être protégés. En intégrant la sécurité dès la conception, les fournisseurs de services peuvent satisfaire aux obligations de protection de la vie privée tout en faisant en sorte que les nouvelles technologies ne s’imposent pas au détriment de la sécurité des enfants. »
Cette résolution s’inscrit dans le prolongement de l’engagement de longue date d’INTERPOL dans la lutte contre les infractions dont sont victimes les enfants et vient s’ajouter aux résolutions précédentes liées à ce domaine de criminalité :
- Résolution AG-2014-RES-02 sur l’amélioration des notifications et de l’échange d’informations au niveau international concernant les délinquants pédosexuels itinérants grâce à l’utilisation des notices vertes INTERPOL (2014) ;
- Résolution AG-2011-RES-08 visant à promouvoir au niveau national une gestion des contenus à caractère pédosexuel centrée sur les victimes (2011) ;
- Résolution AG-2011-RES-05 sur la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants sur Internet par une stratégie de collaboration mondiale en matière législative (2011) ;
- Résolution AG-2009-RES-05 sur la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants sur Internet en utilisant toutes les solutions techniques disponibles, y compris le blocage d’accès (2009) ;
- Résolution AG-2005-RES-09 sur la lutte contre les sites Web qui vendent de la pédopornographie et contre le trafic d’enfants par Internet (2005) ;
- Résolution AGN/65/RES/9 sur la production, la diffusion et la détention de contenus à caractère pédosexuel (1996) ;
- Résolution AGN/65/RES/10 sur l’amélioration de la coopération policière internationale en matière de lutte contre les infractions dont sont victimes les enfants (1996).